15 buts en 18 rencontres de championnat, au moins un but marqué à chaque match entre la 9ème et la 17ème journée dont deux doublés à Boulogne (0-3) et à Reims (3-3), 4 passes décisives... Ces statistiques parlent d'elles-mêmes et elles appartiennent à Guillaume Hoarau, qui explose littéralement en ce début de saison sous les couleurs ciel et marine du doyen des clubs français. Comme son club, le Réunionnais ne s'attendait certainement pas à une telle première partie de saison. Sans prétention particulière, s'auto-proclamant outsider, prêt à jouer le moindre coup à fond, Le Havre s'avançait masqué, avec un projet de montée en Ligue 1 planifié sur deux ans. La trajectoire s'est sensiblement accélérée et aujourd'hui, les destins du nouveau HAC et de sa non moins neuve pépite Hoarau semblent indissociables. La montée en puissance fulgurante de l'un n'aurait certainement pu se faire sans l'autre, et vice versa. Et pourtant... Pourtant Hoarau partira. Dans un mois, dans six mois, voire peut-être un peu plus. La rançon d'une gloire naissante pour un pur produit de la formation normande...
C'est en effet en prospectant du côté de la Réunion et de son club de la JS Saint-Pierre, partenaire du club normand, d'où était déjà issue une autre ancienne gloire havraise, Florent Sinama-Pongolle, que le HAC parvient à rapatrier en janvier 2004 vers la métropole ce gamin inconnu qu'est encore Hoarau. Couvé par l'entraîneur d'alors, Jean-François Domergue, il évolue les six derniers mois de cette saison en équipe réserve pour s'acclimater. Durant la saison 2004-2005, il se contente d'allers-retours entre la CFA 2 et la Ligue 2, où il rogne quelques bouts de match pour, déjà , laisser entrevoir son potentiel et inscrire son premier but, sous la conduite de Philippe Hinschberger. Rebelote la saison suivante où, barré par un explosif duo Lesage-Traoré dont les filets de Deschaseaux se souviennent encore, il entre systématiquement en fin de rencontre et ne peut réellement faire ses preuves. A la fin de la première partie de la saison dernière, Gueugnon l'enrôle alors en tant que joker afin de lui donner du temps de jeu. Bonne pioche : en un peu plus d'une demi-saison, il dispute 21 matches, inscrit 8 buts et contribue grandement au maintien tranquille des Forgerons.
Le Benzema de la Ligue 2
Le garçon est alors, à 23 ans seulement, déjà un routier de la Ligue 2 et le HAC, miné par les départs conjoints de Traoré et de Lesage, décide enfin de titulariser Guillaume Hoarau et même d'en faire le fer de lance de son escouade offensive et, d'un point de vue plus large, de cette jeunesse qui, encadrée par des éléments d'expérience tels que Revault, de retour au bercail, ou Gillet, fait des ravages en ce début de saison. Après un début de saison relativement timide, le longiligne avant-centre met le turbo avec notamment une série de 3 buts en autant de rencontres entre les 5ème et 7ème journées puis cet incroyable enchaînement qui n'est pas sans rappeler la régularité stupéfiante d'un certain Benzema à l'étage du dessus. Avec 11 buts en 9 journées, Hoarau affole les compteurs et seule la deuxième défense du Championnat, Montpellier, est parvenu à le stopper dans son élan. Son mètre quatre-vingt-treize lui permet d'exceller en point de fixation et d'utiliser son jeu de remise, tout en ne rechignant pas à décrocher et à prendre la profondeur. Un registre extrêmement varié donc... Efficacité, rapidité, physique, technique, sens du collectif... Evidemment, la Ligue 1 (et pas seulement) en est folle !
Lens, le Paris-SG, Marseille, Monaco, Auxerre, Strasbourg, Nantes, mais aussi Huelva (où il rejoindrait Sinama-Pongolle), Fulham, Blackburn, sans parler d'un intérêt récent de Chelsea, il y a de quoi faire tourner bien des têtes ! Pas la sienne. Tous ces clubs sont, à des degrés divers, aux aguets sur le dossier Hoarau mais lui reste tranquille : «Mon boulot, c'est le terrain. Mon agent s'occupe de gérer tout ça» . Les termes de son contrat sont un atout de poids dans sa manche. En effet, il sera libre en juin 2008 et énormément de possibilités s'offrent à lui et, surtout, au président havrais Jean-Pierre Louvel : un transfert cet hiver ou une prolongation du contrat de son joyau pour espérer récupérer un pactole relativement inespéré. Sinon, le Réunionnais partira sans rien apporter à son club formateur. Certainement pas l'esprit du goleador : «Je n'oublierai jamais que c'est le Havre qui est venu me chercher à la Réunion. Et puis s'il y a la montée au bout de cette saison, découvrir la Ligue 1 avec un club que je connais peut également être très bénéfique pour moi. Quel que soit mon choix, il sera uniquement basé sur le temps de jeu qu'on me proposera.» Evidemment, ses dirigeants l'ont déjà déclaré maintes et maintes fois "intransférable" . Mais, de façon toute aussi évidente, toute la Ligue 1 se souvient des phénomènes Ribéry ou Drogba (dont Hoarau présente un profil physique très proche), également issus des divisions inférieures. On n'a certainement pas fini d'entendre parler du gamin de la Réunion...