le 20/09/2006 à 18h19

Aruna Dindane ou le retour de Robin

Auteur d'une première saison lensoise mi-figue mi-raisin, l'international ivoirien Aruna Dindane est, après six matches, le meilleur buteur de la compétition. L'heure de l'envol semble avoir sonné pour le joueur sang et or, pas gâté par le sort l'an passé.

Si le talent est un don inné, la réussite est une inconnue après laquelle l'homme n'aura de cesse de courir tout au long de sa vie. Mais la chance, ça se provoque comme on dit et ce n'est pas Aruna Dindane qui affirmera le contraire. L'international ivoirien, en dessous des attentes placées en lui la saison dernière, a démarré l'exercice 2006/2007 sur les chapeaux de roue. Un retour au premier plan pour le joueur lensois qui coïncide avec la montée en puissance de sa formation. Analyse d'une relance gagnante.

Jamais sans sa fille

Débarqué d'Anderlecht en juin 2005 et traînant derrière lui une flatteuse réputation de chasseur de but (50 buts en cinq ans en Belgique) – à tel point que l'OM et le PSG notamment commenceront à s'intéresser de près à son CV –Dindane était attendu dans le Nord pour faire parler la poudre et animer le secteur offensif artésien. D'abord positionné sur le front de l'attaque, Aruna déçoit. Trop maladroit devant le but, il ne confirme pas sa dernière saison belge (14 buts en 29 apparitions). Sa facilité déconcertante à éliminer son vis-à-vis pousse toutefois Francis Gillot, qui croit en lui, à le placer sur le flanc droit de l'équipe sang et or. Le résultat n'est pas convaincant, malgré les six réalisations de l'ancienne vedette d'Anderlecht.

Pourtant, pour comprendre l'exercice en zigzag de Dindane, il faut creuser plus profond, plus loin que la blessure au mollet dont il a été victime en janvier. Et trouver un drame, un de ceux qui brisent une vie. «Je pense encore sans cesse à ma fille. Le football adoucit un peu ma peine, mais sa mort est toujours aussi difficile à accepter. Quand j'ai appris son décès, j'étais à la Coupe d'Afrique des Nations avec mes coéquipiers» . Star incontestée en son pays, artisan de la qualification des siens pour le Mondial allemand, Dindane n'a pu briller sur le sol africain. Endeuillé par la perte de sa fille Raissa, celui que l'on surnomme Robin en raison de sa complicité avec Didier Drogba (Batman) traverse la deuxième partie de saison artésienne sans éclat.

Comme Raï

Forcément revanchard, Dindane annonce la couleur d'entrée en début de saison. «J'espère que je ferai mieux que l'an passé et que je serai épargné par les bobos. Cette saison, je suis là pour m'investir à fond. Je veux être décisif» (La Voix des Sports). Souhait entendu. Aruna, qui a demandé à la LFP que son prénom et non son nom de famille apparaisse sur le dos de son maillot, marque à cinq reprises en six journées de championnat, respectivement devant Troyes (1), Lorient (1), Valenciennes (2) et Sochaux (1). Le glas de la revanche a sonné, au grand bonheur des supporters artésiens qui retrouvent le Dindane autrefois bourreau du PSG au Parc des Princes.

Le PSG justement. Un club qui s'était laissé séduire par le pedigree de ce vif attaquant (1m 73, 75 kg) et qui a connu dans ses rangs un certain Raï, à l'époque critiqué «hier» et adulé «le lendemain» . Un peu le cas d'Aruna en somme. «Ce qui m'arrive est bien, mais je ne sais pas comment je peux l'expliquer. J'essaye de donner le meilleur de moi-même, mais mes buts ne sont pas le plus important, c'est la victoire de l'équipe qui l'est. Quand je suis sur le terrain, j'essaye d'être le plus décisif, que ce soit par les buts ou les passes, c'est avant tout cela mon objectif» (Planète Lens). Pour l'instant, ce dernier est atteint avec en prime la première place au classement des buteurs et déjà une passe décisive à son actif.

Bien meilleur enÂ… attaquant

Attendu pour être un élément majeur de la campagne lensoise l'an passé, c'est cette saison que l'ancien joueur de l'ASEC Abidjan semble prêt à endosser ce rôle. En fait, Aruna a été l'un des nombreux bénéficiaires de la redistribution tactique de l'équipe artésienne. A chaque fois que l'international africain a été aligné cette saison dans le couloir droit artésien – deux fois – le Racing a… perdu (2-3 à Saint-Etienne et 4-0 lors du derby du Nord). Positionné sur le front de l'attaque aux côtés de Jussiê ou de Cousin, Dindane a scoré à chaque fois, en déplacement (Sochaux) et à Bollaert (face à Lorient, Troyes et Valenciennes) et son club n'a pas perdu une seule fois (trois victoires et un nul).

Coïncidence ? Non, juste retour des choses. Evoluant à ce poste en sélection nationale, «Robin» a depuis bien longtemps affiché ses qualités au sein des Eléphants. Malgré l'élimination des siens dès le premier tour de l'épreuve, son doublé face à la Serbie-Monténégro lors du dernier match de poule a confirmé son talent, don qui lui a valu le Soulier d'Or du championnat belge (2005) et le Soulier d'Ebène en 2004 récompensant le meilleur joueur de cette même compétition… Un joyau dont le Racing a bien du mal à se passer, malgré les mauvaises langues affirmant qu'il ne marque que sur les caviars offerts par ses partenaires. Hormis Dindane, il n'y a guère finalement que Jussiê (2 buts) à s'illustrer sur le plan offensif et à pousser le cuir au fond des filets adverses. Kovacevic ayant effectué des débuts prometteurs dans l'entrejeu et Demont s'étant affirmé comme un piston intéressant à droite de même que Jemaa à gauche, l'axe de l'attaque ne devrait plus échapper à l'Ivoirien. Daniel Cousin, muet lors de ses cinq apparitions, peut se poser des questions. Francis Gillot également. Avec la Coupe UEFA, les trophées nationaux et le championnat au menu, il est évident que Dindane devra souffler. Et d'autres se révéler à sa place… sous peine de tomber dans une Aruna dépendance.

Un an d'apprentissage et d'adaptation à notre Ligue 1 et voilà Aruna Dindane, inconstant hier, meilleur buteur du championnat aujourd'hui. La réussite actuelle de l'international ivoirien est d'un grand bénéfice pour son club mais attention au coup de bambou : il ne faudrait pas que Robin devienne le seul élément à sublimer le jeu artésien.

Par Alix Dulac, le 20/09/2006 à 18h19
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