Tout vient à point à qui sait attendre. Ce dicton, Gian Piero Gasperini a dû l'entendre à de nombreuses reprises au cours de sa vie. Il a fallu des années de galère, des essais en veux-tu en voilà, mais à la fin, la sensation du devoir accompli dépasse toutes les espérances. A 66 ans, l'entraîneur italien a enfin pu porter un trophée entre ses mains.
Le match parfait
Ce trophée, c'est celui de la Ligue Europa. Celui qui était promis au Bayer Leverkusen de Xabi Alonso, invaincu au cours des 51 premiers matchs de la saison et qui semblait inarrêtable, lancé vers un triplé improbable. Mais pour accrocher la deuxième C3 de l'histoire du club allemand après celle glanée en 1988, il fallait sortir la Dea et ses longs cheveux portés par le vent. Dans l'atmosphère océanique de Dublin, les premiers Invincibles de l'histoire de la Bundesliga ont pris une trempe comme jamais ils ne l'auraient imaginé.
Durant un peu plus de 90 minutes, on a eu droit à un récital de la part de l'Atalanta. Ce match, les partenaires du génialissime Ademola Lookman - triple buteur mémorable - peuvent le rejouer cent fois, il n'est pas sûr qu'ils proposent une prestation aussi juste, aussi harmonieuse. Intensité, pressing, schémas de passes, organisation tactique, choix des hommes, remplacements, tout était parfait. L'impression que n'importe quelle équipe pouvait affronter la formation de Bergame et repartir avec une valise pleine à craquer. Le match d'une vie pour son entraîneur.
La cicatrice Inter
Des hauts et des bas, Gasperini en a connu tout au long de sa carrière. Des hauts avec le Genoa, qu'il a fait monter en Serie A à l'issue de la saison 2006-2007, lorsque le Grifone a dû batailler avec la Juventus, reléguée à l'échelon inférieur après l'affaire du Calciopoli, et Naples, mais aussi lorsqu'il l'a qualifié pour la Ligue Europa, 18 ans après sa dernière participation européenne. Un passage de quatre années plutôt réussi pour relancer des carrières comme celles de Thiago Motta et Diego Milito, qu'il a retrouvés à l'Inter pour l'exercice 2011-2012.
L'Inter, c'est la grosse rature sur son CV. Un peu plus d'une année après son sacre en Ligue des Champions, le club lombard débutait sa longue mais lente descente. Une chute progressive que Gasperini n'a pas pu empêcher malgré ses principes de jeu innovants. Peut-être un peu trop pour une équipe encore garnie par des grands noms qui ne voyaient probablement pas le tacticien formé en tant que joueur à la Juventus être l'homme providentiel. Cinq mois, c'est le temps qu'il a passé sur le banc nerazzurro avant de plier ses bagages.
Le sommet après 8 années
Le noir et bleu, Gasperini voulait absolument réussir avec cette tunique. Après un court passage dans le Palerme de l'égocentrique et regretté Mauricio Zamparini puis une pige de trois ans au Genoa pour se ressourcer, c'est à l'Atalanta qu'il a décidé de tout mettre à plat. Un choix fort d'Antonio Percassi qui a rapidement payé puisqu'après avoir atteint son meilleur classement en Serie A pour sa première saison en 2016-2017 (4e), la Dea a terminé trois fois de suite à la troisième marche du podium (2019 à 2021). Depuis son arrivée, le club n'a jamais fini au-delà de la 8e place.
Nain du football italien, l'Atalanta est devenue un de ses plus fiers représentants en passant proche d'un dernier carré de Ligue des Champions en 2020, battue sur le fil par le Paris Saint-Germain. Du beau jeu, des beaux footballeurs, de l'enthousiasme, il ne manquait plus qu'un titre, un deuxième dans l'histoire, le premier depuis 1961, pour donner plus de relief à tout ce travail. Après trois revers en finale de la Coupe d'Italie (2019, 2021... et la semaine dernière), le moment de gloire est enfin arrivé avec ce match historique en Irlande pour mettre au tapis la seule équipe invaincue en Europe.
L'émotion de Gasperini
S'il n'a pas toujours fait l'unanimité de par son caractère spécial, Gasperini a forcé le respect de tous en allant au bout de ses idées. C'est forcément ému qu'il a évoqué tout le travail fourni depuis huit ans. «Avoir remporté ce trophée avec l'Atalanta est peut-être l'un de ces contes de fées du football» , a glissé le technicien transalpin après le sacre en C3. «Tout ne se résume pas à des gros chiffres, froids. On peut aussi croire dans des équipes qui ont des budgets plus petits» , a martelé le principal intéressé, qui ne s'est jamais plaint d'avoir perdu des cadres, saison après saison.
«C'est peut-être l'apogée de nos dernières saisons» , a insisté le Piémontais, qui n'a pas voulu avoir de regrets pour un tel rendez-vous en voulant «jouant pour attaquer, car défendre n'était pas suffisant» . Une philosophie de jeu qui a déjà commencé à faire des émules dans un pays où la science de la défense a toujours eu une place prépondérante. Avec cette victoire de l'Atalanta, la première pour un club de Serie A en C3 depuis Parme en 1999, les lignes vont peut-être un peu plus bouger. Et ça, on ne pourra jamais l'enlever à Gasperini.
Que pensez-vous de Gian Piero Gasperini ? Doit-il continuer l'aventure avec l'Atalanta ? N'hésitez pas à réagir et débattre dans la zone «Ajouter un commentaire» ...