La Paillade se noie
Samedi dernier, le Montpellier Hérault Sports Club a subi une nouvelle défaite. A domicile, contre Lille, Montpellier s'est fait surprendre par deux contre-attaques ultra rapides conclues par Matt Moussilou. Face à des Lillois très réalistes, les joueurs de Montpellier n'ont pas réussi à inverser la tendance. Fébriles défensivement et peu créatif offensivement, les Héraultais ont été battus par leurs homologues nordistes dans tout les compartiments du jeu. Un léger sursaut en fin de première période aurait pu leur faire espérer un meilleur sort mais il fut bien trop court pour pouvoir concrétiser devant la cage de Grégory Wimbée. Comme face à Metz, deux semaines auparavant (défaite à la Mosson sur le score de un but à zéro), les Montpelliérains ont procédé en balançant de longs ballons sans danger pour les défenseurs lillois. Le constat dressé par le milieu de terrain Valéry Mezague est équivoque : «On a manqué de tout, il n'y avait aucun lien. Il y a du souci à sa faire» .
A l'issue de la vingt-sixième de journée de Ligue 1, Montpellier se retrouve à la dix-neuvième place du classement. Encore neuvième il y a trois mois, suite à leur succès devant Ajaccio (3-1, le 22 novembre 2003), les joueurs du président Louis Nicollin ont enchaîné depuis une série de douze matchs sans victoires, dont – et c'est l'essentiel – onze défaites et seulement un petit match nul – à domicile contre Bastia (1-1). Autrement dit, les Montpelliérains n'ont réussi à obtenir qu'un seul point sur trente-six possibles ! Traditionnellement jeune, l'effectif héraultais a sans doute cru trop tôt – à l'automne – qu'il échapperait pour une fois à la lutte pour le maintien. Résultat : les joueurs de Montpellier n'ont jamais été aussi proches de la descente en Ligue 2.
Le problème pour Montpellier est simple. Il faut avant tout retrouver la confiance et la volonté suffisante pour relever le défi. Mais il faut dire qu'outre les difficultés que les Montpelliérains rencontrent afin de développer leur jeu, ils connaissent depuis quelques temps un certain nombre de mauvais coups ou de coups du sort qui, à force de s'accumuler, entament le moral des troupes. Aux défaites cinglantes (0-4 au Mans, 2-4 à Strasbourg, 1-3 devant Sochaux, 1-6 au Parc et 0-4 à Monaco), se sont ajoutés la malchance (une expulsion sévère de Dzodic à Lyon, un penalty manqué par Bamogo face à Bastia, un arbitrage défaillant contre l'OM et une blessure ennuyeuse du capitaine Bruno Carotti à Paris) et les imprévisibles intempéries qui ont touchées la région de Montpellier à la fin du mois de novembre. Coïncidence ou signe du destin, depuis que le Stade de la Mosson a été inondée, les Montpelliérains n'ont pas remporté une seule rencontre.
Nouzaret veut surnager
A la suite de la défaite subie au Parc des Princes face au Paris Saint-Germain, Louis Nicollin a décidé de prendre les choses en main. Une décision toujours délicate que celle de l'éviction d'un entraîneur. Qui plus est un homme de confiance, présent au club depuis de nombreuses années, et à l'origine du formidable maintien de Montpellier en Ligue 1 lors de la saison précédente. Gérard Bernardet licencié, le président du MHSC pouvait faire appel à son vieil ami de quarante ans, Robert Nouzaret. Objectif avoué : relancer une équipe à la dérive. Les deux hommes, qui ont collaboré à de nombreuses reprises à la tête du MHSC, vont tenter de préserver le club pailladin en Ligue 1.
Mais Nouzaret a du boulot. Depuis son arrivée, l'équipe de Montpellier a concédé trois revers, en encaissant sept buts et sans en marquer un seul. Au sujet de ses joueurs, le nouvel entraîneur ne mâche pas ses mots : «Pour être bon techniquement ou tactiquement, ça prend du temps, mais avoir de la volonté, c'est à la portée de n'importe quel joueur. S'ils n'ont plus envie de faire des efforts… Là , il faut trouver les bons médicaments» . Très vite, le coach montpelliérain a trouvé les raisons profondes du mal héraultais : les motifs propres au jeu ne sont pas suffisants, c'est avant tout psychologiquement qu'il faut remobiliser le groupe. Encore Nouzaret : «Là , il y a besoin d'un lavage de cerveau. Il faut que je déclenche en eux la volonté de se parler. Il y a forcément un abcès à crever. J'ai l'impression qu'ils se protègent dans une ambiance trop « copains» , trop sereine ».
Car Robert Nouzaret a l'intention d'employer les grands moyens pour parvenir à ses fins. A présent et pour l'avenir, les changements tactiques, ni ceux des joueurs titulaires, ne seront pas foisons. C'est un réveil collectif et un nouvel état d'esprit que l'ancien coach de Saint-Etienne attend de ses joueurs : «Je ne suis pas là pour être leur copain. Je suis là pour être respecté, pas aimé. Je vais essayer d'instaurer un climat où tout le monde veut gagner sa place. Et personne ne pourra aller pleurer auprès du président ou de son fils» . A l'image de son prédécesseur lors de la saison dernière alors que Montpellier se croyait perdu pour la Ligue 1, Robert Nouzaret prône un retour aux vraies valeurs, et notamment à l'amour du maillot. Le temps presse et il faut réagir vite. Samedi prochain, face à un concurrent direct pour la descente – Toulouse, dix-huitième avec le même nombre de points que Montpellier –, Nouzaret et ses hommes n'auront pas le droit à l'erreur. Le mot d'ordre devrait même être : Une victoire sinon rien, … excepté un naufrage !
L'entraîneur, la stat (5) et la décla : Le retour aux sources de Robert Nouzaret
Robert Nouzaret est né en 1943 à Marseille. Il a joué dans cinq clubs français, entre 1964 et 1976. Ce défenseur de métier, qui a commencé sa carrière à l'Olympique lyonnais – club avec lequel il a remporté son unique titre (la Coupe de France en 1967) –, est un ami d'enfance de Louis Nicollin. S'ils se sont rencontrés à Lyon, ils se sont le plus souvent retrouvés à Montpellier. En acceptant de relever le défi que lui a proposé le président héraultais en cette fin de saison 2003-2004, Robert Nouzaret collabore pour la cinquième fois avec «Loulou» . Joueur de Montpellier entre 1970 et 1972 – le club se nommait alors «Montpellier Littoral» –, il fut successivement entraîneur du Montpellier Hérault entre 1976 et 1980, puis entre 1983 et 1985, et enfin manager de 1991 à 1996. Connu pour son fort tempérament mais aussi pour sa franchise et ses qualités humaines, ce globe-trotter du football – il a entraîné neuf clubs différents, dont Lyon, Saint-Etienne et Bastia, et une équipe nationale à deux reprises (la Côte d'Ivoire) – est un homme fidèle en amitié. Et c'est d'ailleurs pourquoi il est conscient qu'un échec avec l'équipe montpelliéraine cette année ne remettrait pas en cause ses relations avec Louis Nicollin. Ce qui n'empêchera pas l'entraîneur de tout mettre en oeuvre pour sauver le club de son coeur et de celui de son ami de toujours.
En parlant de ses nombreux départs de Montpellier, Robert Nouzaret explique : «J'ai toujours pris les devants pour ne pas obliger Nicollin à faire des choix qui lui feraient mal aux tripes» .
Le club de Louis Nicollin n'a jamais été aussi mal en point en cette saison 2003-2004. A présent dix-neuvième du classement de la Ligue 1, les Montpelliérains n'ont pas le droit à l'erreur samedi face à Toulouse. Seule une victoire pourrait leur permettre de croire encore au maintien dans l'élite du football français.