L'apprentissage de la rue
De nos jours, ils sont rares les joueurs connus avant leur début professionnel. Jacques Faty en fait parti. Ca ne lui a pas forcément porté chance d'ailleurs. Capitaine de l'équipe de France championne du Monde des moins de 17 ans en 2001, le jeune d'origine sénégalaise a connu dès ses dix-sept ans les solicitations étrangères et la pression médiatique. Une reconnaissance précoce qui a bien failli sortir ce jeune prodige du droit chemin tracé pour lui.
Doudou-Jacques (son vrai nom) est né à Villeneuve St Georges, petite ville de Val de Marne. C'est là qu'il a commencé à pratiquer... le ping-pong. Un sport où il excellait et dans lequel il a disputé plus de trois ans de compétition. Seul son déménagement dans l'Essone, à Epinay-sous-Sénart, l'empécha de continuer sa progression car «il n'y avait pas de table». C'est alors qu'il se tourne vers le foot: comme beaucoup de jeunes de banlieue, c'est sur les terrains en bas de son immeuble qu'il frappa dans ses premiers ballons. Il apprend alors le football des rues, physique et intraitable et s'y forge un caractère de leader respecté.
Un titre mondial amenant l'ambition
C'est alors que la grande porte s'ouvre: Faty intègre l'INF Clairefontaine. Il quitte son statut d'attaquant pour se replacer en défense. Durant chaque semaine, il travaille avec acharnement et retourne le week-end à Brétigny pour y jouer avec les Nationaux (il dispute trois saisons là-bas). Son travail et son talent font alors le tour de France et s'entendent même à l'étranger. Bologne (futur club de Meghni, champion du Monde avec Faty) lui fait longtemps les yeux doux, mais c'est Rennes qui enlève la perle. Profitant de son partenariat avec Brétigny mais aussi de la réputation de ses équipes de jeunes, le club breton intègre le jeune défenseur. Comme à l'INF, il s'impose sans problème et prend très vite le statut de leader et de grand frère respecté, le tout grâce à une grande prestance naturelle."C’est en moi, reconnaît-il. Mon père est un leader et il m’a appris à l’être sur et en dehors du terrain. C’est comme ça dans la famille."
Dans les équipes de France depuis plusieurs années, Faty grimpe les échelons sans difficulté et arrive en moins de 17 ans où une grande aventure commence. Capitaine de l'équipe, il emmène les siens à Trinidad-et-Tobago où se dispute le Mondial. La défaite initiale contre le Nigéria ne changera rien, les Super Eagles seront battus en finale (3-0) et Faty lèvera la Coupe. «Le moment le plus fort aura été celui où j’ai soulevé la Coupe, se souvient-il. Je n’oublierai jamais !» La reconnaissance ne se fait pas attendre: «Ce qui m’a marqué après ce Championnat, c’est notre réception au siège de la Fédération, avec toutes les caméras et les photographes qui nous ont mitraillés ! Des choses ont changé: le regard des gens, aussi bien dans la rue qu’au sein de ma famille. J'ai ressenti plus de respect, plus d’amitié et de compréhension.» Les ambitions suivent logiquement: «Ce titre va peut-être me permettre d’évoluer plus rapidement, rêve-t-il. Je pense que je vais prochainement participer à l’entraînement avec les professionnels, au sein de l'effectif du Stade Rennais. Mon prochain objectif : devenir professionnel, puis ensuite, progresser de palier en palier.»
Un retour sur Terre un peu difficile
Un peu grisé par sa nouvelle médiatisation, Faty ne résiste pas à la pression et tente de griller les étapes. Le manque de confiance de Christian Gourcuff le pousse à penser à s'expatrier. En Angleterre, on lui promet monts et merveilles, temps de jeu et salaire mirobolant. Toutefois, Faty peut compter sur ses proches pour le ramener sur Terre et vers le travail. A nouveau empreint d'humilité, il fait ses classes en CFA et attend sagement sa chance. Philippe Bergeroo l'integrera au groupe professionnel, puis dans les seize d'un match de Ligue 1. Après la crise et l'introduction de Vahid Halilhodzic à la tête du club, Faty connaît ses débuts en championnat contre Sedan le 2 mars 2003 (1-0). L'entraîneur Bosniaque le place au milieu de terrain où sa technique et sa vision du jeu font merveille. "C’est vrai qu’aujourd’hui, je suis milieu de terrain, reconnait-t-il. J’ai trouvé mes repères, je touche beaucoup de ballons."
Ses neuf apparitions en L1 la saison dernière convainquent même Raymond Domenech de l'appeller en Espoirs: «quand il m’appelle, c’est aussi pour jouer au milieu». On l'a compris, le jeune de 19 ans y est finalement aussi à l'aise qu'en défense centrale. Il profite de ses nombreuses qualités pour s'imposer, mais ne s'est pas résigné à retourner en défense pour y faire valoir son placement, sa sérénité et sa solidité. En attendant, c'est bien dans l'entre-jeu qu'il a été titularisé huit fois depuis le début de la saison, au point de devenir un pion presque essentiel au Stade Rennais.
Héros du championnat du Monde des moins de 17 ans en 2001, Jacques Faty a mis un peu de temps à confirmer les espoirs placés en lui. Finalement, avec une humilité retrouvée, il s'impose petit à petit dans l'entre-jeu rennais comme milieu récupérateur. Avant de franchir une marche supplémentaire ?
Nom : Faty
Prénom : Doudou-Jacques
Âge : 19 ans
Date de naissance : 25 février 1984
Nationalité : Française
Taille : 1m83
Poids : 75kg
Poste : défenseur ou milieu de terrain
Club actuel : Stade Rennais (2000-?)
Sélections : Espoir français.
Palmarès : Champion du Monde des moins de 17 ans 2001.